Crues 06

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jojorgc
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Message par jojorgc » jeu. 15 oct. 2020 15:57

Le problème pour le cas du 06, c'est que le l'évènement d'il y a15 jours ont effectivement activé des sources sédimentaires. Il va falloir que celles-ci se stabilisent et que tout le lit en amont se purge avant de retrouver une situation "normale". Il faut savoir que le transport sédimentaire (érosion/dépot) est lié à des cycles plutôt complexes qui se sur imposent. C'est pour ça qu'on peut trouver un coup une vasque vide, et quelques mois après une vasque pleine.

Il faut aussi comprendre que le transport sédimentaire a plutôt tendance à s'opérer durant les crues importantes. Pour le cas des Oules ou Chichin, le transport sédimentaire des eaux de fontes est surement négligeable. Pour le coup j'ai déjà eu à tester le phénomène dans le bassin ultra actif de Claretto, où avec l'augmentation du débit par la fonte, on s'était pris des caillasses dans le cassé final. C'était pas drôle. Mais j'avais compris pas mal de choses à ce moment là (par exemple, comment les vasques peuvent se vider, alors qu'il y a une contre-pente forte)

Pour le cas de la Mag, ce qui semble être problématique c'est la granulométrie, avec la présence de gros blocs, il va donc falloir de belles crues pour tout évacuer!

Pour les écouges, c'est un phénomène ponctuel. Pour les Oules, on a eu notamment un bel écroulement au 20eme qui a formé un lac de barrage désormais comblé. Le replat limite effectivement l'evacuation des sédiments vers l'aval.
Dernière modification par jojorgc le ven. 16 oct. 2020 09:41, modifié 1 fois.

RV
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Message par RV » ven. 16 oct. 2020 15:08

Chaque cours d'eau a son profil d'équilibre, c'est-à-dire la situation de la plupart d'entre eux avant l'épisode cataclysmique que nous avons connu. Ils viennent de subir une charge détritique énorme avec des énergies associées monstrueuses qui ont transformé en éboulis les canyons les plus sculptés. Le point positif est qu'ils vont tendre à retrouver cet équilibre le plus vite possible, le point négatif c'est la quantité des alluvions à remobiliser. Mais si l'eau les a amenées, elle pourra aussi bien les dégager vers l'aval et j'ai bon espoir qu'elle le fasse assez rapidement. Il faudrait confier la question à un labo de dynamique sédimentaire et de modélisation des fluides...
J'ai des exemples autour de la maison de 2 cours d'eau que je connais très bien, Vabre et Bramefan, faibles déclivités, petits bassins versants, un filet d'eau en été, quelques centaines de litres en crue, une forte charge sédimentaire, en amont on trouve des barres calcaires perdues au milieu de marnes shistosées (terres noires ou robines). On observe en fonction des crues hivernales et de leurs énergies, des purges ou des remplissages de vasques à des échelles de temps très courtes de l'ordre de la journée et de la semaine. Elles peuvent passer très rapidement de 20 cm à 4 m de fond et inversement. Et ce n'est pas seulement du gravier et du sable, mais aussi des blocs de plusieurs dizaines de kilos. C'est surtout vrai en bas des ressauts principaux, le reste des cours d'eau au profil presque plat reste bien encombré.
Donc pour la Maglia et Cramasourri, où ce n'est pas la même dimension, j'espère bien que les principales cascades et vasques retrouvent leurs physionomies habituelles, cela risque d'être plus long pour la totalité des canyons.
Dernière modification par RV le ven. 16 oct. 2020 15:09, modifié 1 fois.

chrisbiot
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Message par chrisbiot » ven. 16 oct. 2020 17:43

Faudrait mettre des pelles ou des seaux a dispo sur les vasques les plus intéressantes a déblayer et chaque canyonneur qui passe contribue 15 mn de son temps a sortir quelques pelletées/seaux :dance:
Dernière modification par chrisbiot le ven. 16 oct. 2020 17:45, modifié 1 fois.

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Message par Caracal » ven. 16 oct. 2020 18:19

chrisbiot a écrit :Faudrait mettre des pelles ou des seaux a dispo sur les vasques les plus intéressantes a déblayer et chaque canyonneur qui passe contribue 15 mn de son temps a sortir quelques pelletées/seaux :dance:
Entre nous je pense que vu l'intérêt économique de certains canyons, cela se fera surement ainsi. Et sans être médisant ;).

En tout cas, merci aux explications géologiques, approfondies et claires :)
Quoi qu'il en soit, on finira tous un jour dans un lit :mrgreen: :mrgreen:

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Rataksès
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Message par Rataksès » sam. 17 oct. 2020 10:50

Caracal a écrit : En tout cas, merci aux explications géologiques, approfondies et claires :)
La je plussoie O:)

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guigui
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Message par guigui » sam. 17 oct. 2020 17:11

Il y a quelques années, lors d'un contrôle hivernal peu après la réouverture après l'accident mortel lié à la chute de roche, on était tombé sur plusieurs blocs de taille métrique dans le saut après la machine à laver. La même descente il y avait eu une purge depuis la route qui avait bombardé depuis le saut dynamité jusqu'à la confluence de morghé, plus rien ne sautait et le dernier bassin avait été remplit par une lave venant de vignourette. Plus pleins d'autres blocs et glissement un peu partout
L'été suivant, les blocs avaient déjà bougé et deux ans après le saut était de nouveau possible après la machine à laver et dans la suite du canyon. 3 ans après les bassins étaient vides. J'ai même pas réussi à identifier les blocs dans les chariages en aval.
J'ai appris quelques trucs geol et hydrogeol en observant mais des choses m'échappent encore. Je me demande dans quelle mesure les blocs peuvent être broyés et éjectés des bassins par les crues ou même dissous.
Il va y avoir des analyses intéressantes à faire les prochaines années.

Je ne sais pas encore dans quel état on va retrouver Bollène mais je me souviens de galets métriques à plusieurs mètres au dessus du lit par endroit, ce qui témoigne d'un ancien remplissage passé : crues de roquebilliere en 1900? Qui s'était bien vidé.
Dernière observation dans roudoule il y a un ou deux ans avec de gros blocs décimétriques du départ jusqu'à la confluence avec croc. Cette année, tout sautait, je sais même pas où sont passés ces blocs :shock:
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Message par jojorgc » dim. 18 oct. 2020 22:31

RV a écrit :Chaque cours d'eau a son profil d'équilibre, c'est-à-dire la situation de la plupart d'entre eux avant l'épisode cataclysmique que nous avons connu. Ils viennent de subir une charge détritique énorme avec des énergies associées monstrueuses qui ont transformé en éboulis les canyons les plus sculptés. Le point positif est qu'ils vont tendre à retrouver cet équilibre le plus vite possible, le point négatif c'est la quantité des alluvions à remobiliser. Mais si l'eau les a amenées, elle pourra aussi bien les dégager vers l'aval et j'ai bon espoir qu'elle le fasse assez rapidement. Il faudrait confier la question à un labo de dynamique sédimentaire et de modélisation des fluides...
J'ai des exemples autour de la maison de 2 cours d'eau que je connais très bien, Vabre et Bramefan, faibles déclivités, petits bassins versants, un filet d'eau en été, quelques centaines de litres en crue, une forte charge sédimentaire, en amont on trouve des barres calcaires perdues au milieu de marnes shistosées (terres noires ou robines). On observe en fonction des crues hivernales et de leurs énergies, des purges ou des remplissages de vasques à des échelles de temps très courtes de l'ordre de la journée et de la semaine. Elles peuvent passer très rapidement de 20 cm à 4 m de fond et inversement. Et ce n'est pas seulement du gravier et du sable, mais aussi des blocs de plusieurs dizaines de kilos. C'est surtout vrai en bas des ressauts principaux, le reste des cours d'eau au profil presque plat reste bien encombré.
Donc pour la Maglia et Cramasourri, où ce n'est pas la même dimension, j'espère bien que les principales cascades et vasques retrouvent leurs physionomies habituelles, cela risque d'être plus long pour la totalité des canyons.
Alors là tu confonds deux choses. La question du profil d'équilibre -> chaque cours d'eau tend vers un profil en long de forme concave (la pente diminue vers l'aval). Les canyons sont justement des "anomalies" que le cours d'eau "tente" d'éffacer au fil du temps. Globalement, un épisode de ce niveau là a plutôt tendance à ajuster le profil.
La notion d'équilibre dynamique est plus récente, et est pas mal employée par les géomorphologues fluviaux. Elle a notamment été démocratisé par J-P Bravard. Elle décrit que chaque cours d'eau possède une dynamique globale qui lui est propre, et qui s'équilibre entre les apports liquides et solides. Après une perturbation, le cours d'eau tend à revenir à son état initial. Si des changements profonds se produise, on obtient une métamorphose fluviale, c'est à dire une transition vers un nouvel état d'équilibre dynamique. Pour notre cas, la question est de savoir si on est dans une métamorphose fluviale durable, ou bien si on va pouvoir tendre vers l'état initial plus ou mois rapidement.

Sinon, la modélisation, faut, dans les canyons, c'est clairement pas efficace. Trop d'incertitudes. Et on est trop souvent ébloui par la beauté d'un résultat qui donne des chiffres derrière la virgule... Il vaudrait mieux imaginer des protocoles de mesure et de suivi. Au besoin, j'ai déjà établi des protocoles pour suivre l'engravement de vasques (la première étude que j'ai réalisée en lançant mon BE)....

RV
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Message par RV » lun. 19 oct. 2020 00:20

Il est bien évident que je ne parlais pas de profils d'équilibre théoriques non adaptés au cas des canyons, mais plutôt aux profils d'équilibre réels, comportant de nombreuses ruptures de pente. Ces perturbations modifient l'évolution du rapport entre les débits liquide et solide des écoulements, comme par exemple les variations lithologiques du lit de la rivière, les accidents structuraux, les ouvrages anthropiques ou les confluences ; selon les cas, les variations du profil du cours d'eau seront alors soit convexe ou soit concave.
Dernière modification par RV le lun. 19 oct. 2020 10:45, modifié 1 fois.

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