Bon, j’ai un p’tit coup de mou au boulot, là…

Une des formules magiques qui permettent de déterminer un débit de crue pour les petits bassins est ce que l’on nomme en hydrologie, « la méthode rationnelle », dont l’expression est la suivante :
Q=C.I.A/3.6
avec
Q : débit en m3/s
C : coefficient de ruissellement, soit le rapport entre ce qui ruisselle réellement lors d’une averse et la hauteur totale précipitée. C est compris donc entre 0 et 1
I : l’intensité de l’averse pluvieuse, en mm/h
A : la superficie de bassin versant drainé, en km²
A noter que l’intensité est calculée sur le temps de concentration du bassin tc, c'est-à-dire grosso modo, le temps que met la petite goutte qui tombe tout en haut du bassin pour atteindre l’endroit où l’on souhaite avoir le débit.
Il y a pas mal de formules pour estimer tc, mais en première approximation, on peut partir sur quelque chose de simple, en divisant le cheminement hydraulique le plus long (de la petite goutte) par une vitesse moyenne de 2 m/s.
Pour le calcul de l’intensité, on se base sur ce que l’on appelle les courbes Intensité-Durée-Fréquence (courbes IDF), de la forme suivante : I=a.t^-b avec a et b, coefficients de Montana.
Sans rentrer dans les détails, ces courbes sont issues de l’analyse statistique des données pluviométriques locales.
Tout ça, c’est bien beau, mais c’est un peu abstrait.
Prenons un exemple : le Llech
Il présente, au départ de la descente, les caractéristiques suivantes :
Superficie A du bassin : 17.3 km²
Longueur L du plus long cheminement hydraulique : 9400 m
Temps de concentration tc ; prenons L/2, soit 4700 s, soit encore 1.3 h
Pour un épisode de période de retour centennal (qui a donc une chance sur 100 de se produire par an), l’intensité sur tc est de l’ordre de 90 mm/h
En général, pour les crues de fréquence rare, le coefficient de ruissellement C est fort à très fort. Soyons optimiste, prenons ici C=0.6,
Sur la base de la méthode rationnelle, notre débit de crue est estimé à 260 m3/s.
C’est pas mal non ? Si l’on prend toujours une vitesse moyenne de 2 m/s, ça nous fait une section d’écoulement de 130 m². Par endroit, le Llech n’est pas très large, ça veut dire que le niveau d’eau peut grimper d’une dizaine de m en quelques instants….
Pour info, lors de l’Aiguat de 1940 dans les PO, les débits suivants avaient été estimés :
Cady, à Villefranche : 600 m3/s
Riuferrer, à Arles/Tech : 650 m3/s
Lentilla, à Vinça : 900 m3/s
La Coumelade, au Tech : 1000 m3/s
Pour ceux qui connaissent le coin, ces valeurs sont difficilement imaginables lorsque l’on voit la tête des cours d’eau…

Globalement, au-delà de ces débits, le truc vraiment utile pour nous, canyonistes, est peut-être l’estimation du tc : ça peut servir pour savoir si le cours d’eau réagit très vite ou non, et de quelle marge on peut disposer en cas d’orage imprévu pour sauver ses fesses…en même temps, connaître le débit potentiel peut éventuellement servir pour savoir le cas échéant à quelle hauteur il faut grimper pour être en sécurité.
Sur ce, je vous laisse, le travail m'appelle...
